G râce à sa mère qui demande des bourses pour sa fille, Rose Valland entre à l'Ecole Normale d'institutrices de Grenoble. Douée pour le dessin et encouragée par ses professeurs, elle part suivre les enseignements de l'École nationale des beaux-arts de Lyon où elle s'y fait remarquer et obtient de nombreux prix.
En 1922, elle entre à l’École nationale supérieure des beaux-arts de Paris. Elle réussit ensuite le concours du professorat à l’enseignement du dessin, 6e sur plus de 300 candidats.
Détentrice d'une licence spéciale d’histoire de l’art et d’archéologie
Après l'obtention de trois certificats d’études supérieures d’histoire de l'art moderne, d’archéologie médiévale, et d'archéologie grecque, et la présentation de sa thèse du Louvre, une licence spéciale d’histoire de l’art et d’archéologie lui est décernée. Elle voyage en Italie et probablement en Allemagne, dont elle parle la langue, sans pourtant l'avoir jamais étudiée durant sa scolarité. À partir de 1932, elle devient « attachée bénévole » au musée des peintures et sculptures étrangères de la Galerie nationale du Jeu de Paume aux Tuileries. Elle s'y occupe du catalogue des collections du musée, puis travaille à la réalisation d’une quinzaine d’expositions internationales et à leur catalogue. Elle écrit également de nombreux articles dans des revues d’art et des journaux. Elle ne sera pourtant titularisée, et salariée, qu'en 1941. [Image : Rose Valland au musée du Jeu de Paume en 1934, photo DR]
Pendant l'Occupation allemande
A partir d'octobre 1940, Rose Valland reste en activité au Musée du Jeu de Paume, officiellement comme attachée de conservation, chargée officieusement par Jaujard, alors directeur des Musées nationaux, de lui rendre compte des agissements des Allemands qui viennent de réquisitionner le musée pour y stocker les œuvres d'art spoliées à des collectionneurs privés. Pendant l'Occupation, les Allemands commencent à travers la France un pillage systématique des œuvres des musées et des collections privées, principalement celles appartenant à des Juifs déportés ou ayant fui. Ils utilisent le musée du Jeu de Paume comme dépôt central avant d'orienter les œuvres vers différentes destinations en Allemagne, en Autriche et en Europe de l'Est. Pendant quatre ans, Rose garde la trace des mouvements, de la provenance et de la destination des œuvres. Elle rédige des dizaines de fiches de manière scrupuleuse, déchiffre les papiers carbone allemands dans les poubelles du musée, écoute les conversations des officiels nazis. Elle fournit également des informations essentielles à la Résistance sur les trains qui transportent les œuvres, afin que ces convois soient épargnés par les résistants.
L'après-guerre
À la suite de la libération de Paris par les troupes alliées et jusqu'au 1er mai 1945, elle travaillera avec le SHAEF (Supreme Headquarters Allied Expeditionary Force) donnant aux Américains des informations capitales sur les sites de stockage des œuvres transférées en Allemagne et Autriche. Elle est également nommée secrétaire de la Commission de récupération artistique et chef de poste central de la récupération artistique en Allemagne et en Autriche. Elle devient « officier Beaux-arts » dans la 1re armée française, chef du Service de remise en place des œuvres d'art - Récupération artistique, division Éducation publique du Groupe français du Conseil de Contrôle. Elle a le grade de capitaine. Elle coopère avec les agents américains et témoigne au procès des dirigeants nazis à Nuremberg. Entre 1945 et 1954, elle aura participé au rapatriement de plus de 60 000 œuvres et objets divers spoliés aux institutions publiques.
En ce qui concerne sa vie privée, ouvertement homosexuelle et féministe, Rose a des aventures avec des femmes dès son arrivée à Paris. Elle restera jusqu'à sa mort avec la Britannique Joyce Heer avec qui elle partage un appartement dans le 5e arrondissement. Elle publie la thèse de sa compagne, La personnalité de Pausanias, de façon posthume aux éditions des Belles-Lettres.
[Image : Rose Valland en tenue militaire, crédit image : rosevalland.com]
Hommages
- Rose Valland meurt en 1980 à l'âge de 81 ans dans une relative solitude à Ris-Orangis, en banlieue parisienne. Elle est enterrée avec sa compagne dans son village natal de Saint-Étienne-de-Saint-Geoirs, où un collège porte son nom. La vie et l'action de Rose Valland ont d'abord inspiré John Frankenheimer pour son film le Train (1964), au scénario en partie basé sur ses mémoires publiés en 1961 : on y voit un personnage qui s'appelle « Mme Villard ». En 2006, Corinne Bouchoux publie la première biographie consacrée à Rose Valland. Monuments Men en février 2014, film réalisé par le comédien-réalisateur George Clooney, où il met en scène le personnage de Claire Simone, interprété par Cate Blanchett, qui reprend les caractères de Rose Valland. En 2015, le film L'Antiquaire de François Margolin évoque la figure de Valland.